EVOLUTION EN MATIÈRE DE RÉCEPTION TACITE

Aux termes de l’article 1792-6 du Code Civil :

« La réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement »

Les garanties légales et, spécialement, la garantie décennale prennent effet à compter de cette date.

Il est donc très important que cette réception ait lieu si vous voulez bénéficier de ces garanties légales.

Normalement, lorsque les travaux sont achevés, le maître d’ouvrage, souvent assisté par le maître d’œuvre, réceptionne les travaux en présence du locateur d’ouvrage qui les a exécutés.

Un procès-verbal est dressé sur lequel sont mentionnés les vices apparents éventuellement constatés, qui font l’objet de réserves.

Toutefois, il arrive souvent que les parties à l’acte de construire ne respectent pas ce formalisme et qu’aucun procès-verbal ne soit dressé.

Pour autant, le maître d’ouvrage n’est pas nécessairement privé du bénéfice de la réception.

En effet, il peut palier à l’absence de procès-verbal en demandant au Tribunal de constater l’existence d’une réception tacite.

En fonction des circonstances de la cause (avancement du chantier, paiement du prix par le maître d’ouvrage, prise de possession des lieux, etc), les juges constatent l’existence ou non de la volonté non équivoque de recevoir l’ouvrage qui caractérise cette réception.

Ainsi, il a été jugé que, dès lors que le maitre d’ouvrage prenait possession de l’immeuble, sa volonté non équivoque, de procéder à la réception du bien, était caractérisée (pour exemple Cass. Civ. 3ème 16 février 2005, n°03-16 881).

Or, cette jurisprudence, semble avoir été remise en question par deux arrêts rendus par la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation, dont l’un a été publié au Bulletin.

Dans celui-ci (Cass. Civ. 3e 13 juillet 2016, n°15-17208 ), la Cour suprême a cassé un arrêt d’appel au motif qu’il n’avait pas caractérisé une volonté non équivoque de ne pas recevoir l’ouvrage.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000032902728&fastReqId=1341811212&fastPos=1 

Le maître d’ouvrage est présumé vouloir recevoir l’ouvrage, alors que, précédemment, sa volonté devait être démontrée.

Si d’autres décisions venaient à statuer dans le sens de l’arrêt du 13 juillet 2016, le prononcé de la réception tacite, serait grandement facilité.

Une telle évolution serait favorable au maître d’ouvrage souhaitant obtenir la garantie d’un assureur décennal.

Ceci étant, pour que la garantie décennale trouve application, celui-ci devra toujours démontrer que les vices dont il demande réparation n’étaient pas apparents lors de la réception.

En effet, si tel était le cas, le Tribunal pourrait constater une réception tacite assortie de réserves, faisant échec à la mise en œuvre de cette garantie pour les désordres réservés.

Pour en savoir plus : M.-L. Pagès de Varenne « Réception de l’ouvrage » Constr.-Urb. 2016, comm. 121 ; « la réception tacite se présume-t-elle ? », RDI 2016, p.647

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