Précisions sur la prescription de l’action en garantie des vices cachés et l’application dans le temps de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile

I. Les délais d’action en garantie des vices cachés : la création d’un délai butoir

Autrefois soumise aux incertitudes quant à la notion de « bref délai », l’action en garantie contre les vices cachés est aujourd’hui enfermée dans un délai de prescription de deux ans (C. civ., art. 1648) qui court à compter de la connaissance du vice par l’acquéreur.
L’institution d’un délai butoir par l’article 2232, alinéa 1er, du Code civil, issu de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, constitue une innovation notable. Ainsi, le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.

II. Précisions par la Cour de cassation sur le délai butoir et l’application temporelle de la loi du 17 juin 2008

Par un arrêt du 10 octobre 2020 (Cass. 3e civ., 1er oct. 2020, n° 19-16.986, FS-P+B+I : JurisData n° 2020-015339), la troisième chambre civile de la Cour de cassation a apporté des précisions quant à l’application temporelle du délai butoir prévu par l’article 2232, alinéa 1er, du Code civil.
En l’espèce, le dernier acquéreur de deux bungalows formant un seul immeuble avait découvert des désordres affectant la solidité de celui-ci et assigné en garantie des vices cachés les vendeurs d’origine.
Or, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, considérant que le point de départ du délai de prescription est le jour du contrat, a déclaré l’action engagée vingt ans après la signature de l’acte de vente irrecevable, car prescrite en application de l’article 2232 du Code civil pour un contrat de vente conclu avant le 17 juin 2008.

1. Le jour du contrat comme point de départ du délai butoir
Sur le premier point relatif au départ du délai butoir, la Cour de cassation approuve le raisonnement de la Cour d’appel.
C’est à bon droit que celle-ci a constaté que l’action en garantie des vices cachés a été reportée au jour où l’acquéreur a eu l’entière connaissance du vice, et a déterminé le jour de la naissance du droit qui consacre l’obligation à la garantie des vices cachés au sens de l’article 2232 du Code civil, comme étant le jour du contrat.

2. L’application dans le temps de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile
En revanche, sur le second point, la Cour de cassation rejette l’application rétroactive faite par la Cour d’appel des dispositions de la loi du 17 juin 2008.
En appliquant le délai butoir prévu à l’article 2232 du Code civil à une situation où le droit en garantie est né avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, la Cour d’appel a violé l’article 26 de la loi du 17 juin 2008, l’article 2 et l’article 2232 du Code civil.
En l’absence de dispositions transitoires applicables au délai butoir, il convient d’appliquer la règle générale de non-rétroactivité de la loi nouvelle.

Le délai butoir de vingt ans prévu par l’article 2232 du Code civil n’est donc pas applicable aux actions en garantie des vices cachés portant sur un contrat de vente signé avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008.
ATTENTION DONC : pour les contrats de vente conclus après le 19 juin 2008, l’action en garantie des vices cachés doit être engagée avant vingt ans.

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